jeudi 24 septembre 2009

Leadership ou souveraineté ... DYDO 5 403 choisira t'il la liberté ?

Attentive au monde de l'entreprise, lieu où j'interviens, microcosme de la société de pouvoir où se trame des drames et harcellements quotidiens. Dans une grande entreprise où plusieurs personnes se sont données la mort récemment, il n'y a plus d'identité, les personnes ne sont plus appelées par leur nom. Celui-ci a été remplacé par des numéros : "Comme ses collègues, à chaque fois qu’il doit effectuer une transaction, il est identifié par un code comportant quatre lettres et quatre chiffres.
"Le sien, c’est DYDO 5 403".

Comment continuer à vivre dignement quand sa propre identité est niée, remplacée par un code qui rappellerait le bagne. Le nom qui nous est donné est la reconnaissance de notre existence. Quand le nom est remplacé par un code, il ne reste qu'à rejeter sa propre existence.

Je termine l'accompagnement d'un groupe de personnes "leaders" dans leur entreprise, "responsables" hiérarchiquement de nombreuses personnes. Je souligne "responsables car, hélas, elles ont souvent perdu la souveraineté de leur propre vie.
L'accompagnement proposé dure 6 jours et la salle est vide. Quelques chaises, de l'eau et des tapis pour respirer et imaginer ... Les premiers jours sont souvent emprunts de tensions, gênes, refus, détournements de regards, et silences. Parfois la colère se montre devant ce non-faire proposé. "Je suis venu me former au leadership, qu'allons nous FAIRE à présent ?"
Le silence est non seulement accepté ici, il est encouragé. Et là, au sein de ce silence fécondant, ces personnes qui vivent en accéléré dans un "faire" intense, peu à peu s'ouvrent à elles-mêmes. Là où il n'y avait plus de place pour des questions, des interrogations sur le sens de cette vie, peu à peu une faille s'ouvre laissant la place à de nombreuses rationalisations et défenses sur les non-choix effectués.
Jour après jour, les silences deviennent vivants, espaces de communion, de rencontre à soi, de complicité avec la parole de l'autre où de raisonance ... Silence bienveillant. Des mouvements effleurent les visages, un rayonnement, des yeux qui brillent, des lèvres qui sont mordues, une tristesse intense avec un regard dans le vague, et la parole reste difficile pour se dire autrement que par des procédures, des comptes de résultats, des actionnaires mécontents, et finalement une insatisfaction intense et profonde.
Une gorge se râcle et à nouveau la parole jaillit laissant apparaître l'espace d'un monde nouveau. Le partage d'une souffrance, d'un empêchement d'être, d'un oubli de l'Etre ...
Témoignage d'un homme qui me dit ne plus en avoir que pour "15 ans de bagne" avant de penser retrouver une liberté. Mon coeur bondit à entendre ces mots ! Je l'invite à regarder en quoi il est acteur de ses choix, c'est impossible, il ne peut aller jusque là. La société est trop prégnante dans son monde, encore ...
Plus tard une femme retient depuis plusieurs jours des larmes, comment "craquer" quand on est responsable de 25 personnes ... Comment "tout lâcher" quand on est mère de trois enfants ... Alors, retenir est le maître mot. Les mâchoires et la non respiration aident à ce projet de contrôle. Il reste les yeux qui ne trahissent pas. Alors les yeux ne fixent plus, ils èrrent d'un côté à l'autre de la salle, comme si ils cherchaient une sortie ...

Six jours à se dire, à retrouver la parole, l'espace créatif en soi ... les 6 jours se terminent par un cercle, vibrant et reconnaissant de ces précieux partages de vie. Ils ont témoigné avoir retrouvé un souffle : celui de l'être et du faire en plus grand équilibre.

Le garderont-ils ? ils ne savent pas le dire. Ce qu'ils savent, c'est que ce qu'ils ont vécu là restera gravé dans leur coeur.

Un homme termine le cercle par cette phrase : "La première chose que je vais faire en rentrant, c'est de dire aux personnes qui m'entourent que je les aime".

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